Vendredi 21 juillet.
Anatole se sent mieux, il souhaite
reprendre la route plutôt que de passer une journée de plus à l’hôtel. La
tourista semble oubliée, nous veillons à ce qu’il s’hydrate bien.
Pour midi, nous arrivons à Sicuani
qui grouille de monde. Nous sommes bloqués par un défilé d’écoliers qui fêtent
le début de deux semaines de vacances. Nous atteignons tant bien que mal
l’immense marché pour y déjeuner.
Dans l’après-midi, nous
franchissons les 4 000 m d’altitude et nous arrivons à Aguas Calientes.
Pour cinq soles par personnes (1,25 €), on nous autorise à planter la tente sur
le site et à profiter des bassins d’eaux chaudes. De petits canaux les
alimentent et régulent leur température et leur débit. Nous passons un long
moment à discuter avec un groupe d’amis péruviens. Avant de partir, ils nous
lisent un verset de la bible, puis font une prière pour notre famille et notre
voyage.
A 19h30 les enfants sont toujours
dans l’eau. Le soleil est couché depuis une heure et demie et les températures
sont maintenant négatives. Il est temps de manger un bout et d’aller se
coucher.
Samedi 22.
La journée commence comme a fini la
précédente. Le bain matinal ne nous met pas en avance, on y resterait des
heures…
Le petit défi du jour est le col de
la Roya à 4 338m. Nous nous laissons ensuite glisser jusqu’à l’Altiplano, l’immense
plateau andin qui s’étend sur près de 1 500 km.
Nous mangeons dans la ville de
Santa Rosa, où une petite fille bien bavarde vient nous demander pourquoi nous
sommes blancs. Nous parcourons encore quelques kilomètres pour planter la tente
sur un côteau en contre-haut de la route. La vue est splendide.
Dimanche 23.
Jour du seigneur, la route est quasi
déserte. L’Altiplano, synonyme de longues lignes droites avec très peu de
dénivelé, nous invite à profiter de la vie paysanne. Les petites fermes et les
troupeaux de vaches sont nombreux, il nous faudra goûter le fromage. Celui qui
traine dans nos sacoches depuis Cuzco est maintenant moisi et, sur la place d’armes
d’Ayaviri, nous nous contentons d’un peu de pain, de fruits et de quelques
gâteaux pour refaire le plein d’énergie. Nous faisons également le plein d’eau
dans une station-service.
Nous en avons un peu marre de la
route 3S. Nous faisons le choix d’emprunter une piste qui doit nous mener jusqu’au
canyon de Tinajani. Nous ne sommes pas déçus. Nous plantons la tente dans une
ferme, le long de la rivière, en plein milieu des gorges. Nous passons la fin
de l’après midi à sillonner le site.
Lundi 24.
L’étape du jour s’annonce
difficile. Pour rejoindre Juliaca dans deux jours, nous devons franchir un col
à 4 610 m par la piste de la veille, avec des passages à plus de 15%. Nous
en bavons, mais les paysages qui changent sans cesse sont incroyables. Nous
sommes surpris par une forêt de puyas de raymondi, des palmiers d’altitude, par
un lac où se rencontre une multitude d’oiseaux, par les falaises, par les
sommets et les alpages andins.
Sur notre passage, les lamas et les
alpagas s’écartent. Les chiens qui les gardent aboient mais ne sont jamais
agressifs.
En fin de journée, nous retrouvons
une petite route asphaltée. Il est 15h30 et temps de s’arrêter. La nuit tombe
peu après 17h30, les températures chutent vite. Cela laisse deux heures pour
monter le camp et préparer le repas du soir. Après avoir jeté nos dernières
forces dans le franchissement d’une rivière, nous plantons la tente au milieu
de constructions abandonnées, sans doute d’anciens moulins, en témoignent les
grosses pierres de meule encore présentes sur place.
L’étape du jour fera sans aucun
doute partie des plus belles qu’il nous ait été donné de parcourir. En
France, de tels sites seraient sans doute sur-fréquentés.
En une journée, nous avons croisé
deux camionnettes et salué quelques bergers.
Mardi 25.
Nous nous réveillons à 6h30. Le
jour s’est levé depuis une bonne demi-heure mais le thermomètre affiche encore
-10°C. Nous attendons les premiers rayons du soleil, toujours caché dernière la
montagne. L’atmosphère est tellement sèche que, même à cette température, il n’y
a pas un poil de givre sur la tente. Cela nous fait toujours gagner un temps
précieux quand nous pouvons plier la toile sans avoir à la faire sécher.
Comme chaque matin, nous nous
mettons en selle sous un soleil radieux. Nous rejoignons l’Altiplano et, à midi,
nous nous retrouvons par hasard pris au milieu d’un défilé religieux. S’en
suivent la fanfare et la cavalerie. C’est la fête annuelle du village de Lampa et
de son Saint patron, Santiago. Les gens, endimanchés, nous regardent un peu
intrigués. Elliot, qui vit la moitié du temps en Espagne et l’autre au Pérou, nous
interpelle et nous emmène manger dans le restaurant de son ami : au menu,
truite et alpaga.
Notre point de chute du soir est la
casa ciclista de Geovanni, à Juliaca. Qui dit Altiplano, dit kilomètres vite
avalés et malgré notre longue pose du midi, nous arrivons assez tôt dans la
banlieue de la ville, qui compte 220 000 habitants. Les détritus jonchent
les bas-côtés, les sacs en plastique volent au vent, les tas de gravats
recouvrent les trottoirs, et la route, défoncée et pleine de nids de poule part
en poussière… Nous arrivons chez Geovanni, contents et crasseux.
Mercredi 26.
Journée de repos : il nous
faut trouver una lavanderia pour repartir propres, faire quelques courses pour
remplir les sacoches et essayer de profiter de la ville qui fourmille
en cette veille de grève générale et de fête nationale. Nous passons du temps à
la casa à discuter avec Geovanni qui nous reçoit, incroyable d’investissement et de dévouement, avec Fanny et Joachim, une Suissesse et un Argentin, et Guillermo, un Brésilien, d’autres voyageurs de
passage.
Si nous ne sommes pas empêchés par
la grève et les barrages éventuels, nous reprendrons la route demain, en direction
du lac Titicacca. Nous y passerons quelques jours et fêterons l’anniversaire d’Anatole.