Samedi 2 septembre.
Nous quittons Pisiga, ville
frontalière repoussante de prime abord. Mais nous y avons passé deux nuits et
nous avons réussi à prendre quelques repères et déjà des habitudes. Il y a peu
de gringos dans le coin. Les commerçants nous reconnaissent et finalement, à
Pisiga, on ne s’y sent pas si mal. Mais ce n’est pas une raison pour y rester
plus longtemps. Prochains objectifs : les salars de Coipasa et d’Uyuni.
Nous laissons rapidement de côté la
route asphaltée des camions pour nous engager sur une piste. Au pied du volcan
Sabaya, le sable gris du désert de Carangas nous donne du fil à retordre.
En se mélangeant au sel des salines
de Coipasa, il s’éclaircit petit à petit, il devient moins meuble, jusqu’à
laisser place à une croûte de sel dure comme du béton. Nous y sommes : le deuxième
salar le plus grand du monde, celui de Coipasa, nous ouvre ses portes. Dès les premiers
tours de roues sur cette immensité blanche, une émotion forte nous saisit, un
rêve se réalise. Nous roulons dix petits kilomètres sur le salar avant de
regagner l’île de Coipasa, mais ce n’est qu’un début.
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Dans l’après-midi, le vent se lève.
Il devient violent. Difficile d’espérer monter la tente ce soir.
Au village de Coipasa nous trouvons
un alojamento chez la propriétaire d’une petite épicerie. Nous passerons la
nuit dans une chambre d’ado. Les toilettes et le point d’eau sont dans la cour,
il n’y pas de douche, mais nous voilà à l’abri des assauts du vent, et des
petits pains tout chauds sortis du four viennent récompenser les efforts du
jour.
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Dimanche 3.
Lison est malade, la Bolivie
n’épargne pas le ventre des Européens. Le vent a également sifflé toute la
nuit, il ne s’est pas calmé. Deux bonnes raisons pour ne pas reprendre la
route.
Pendant que Lison se repose et
qu’elle teste les remèdes locaux aux bonnes herbes des montagnes, nous partons
arpenter le village et ses alentours. La tempête sévit. Au cœur d’une des
régions les plus inhospitalières de l’altiplano, le sel, le sable, le froid,
l’altitude, les steppes et le manque d’eau ne sont pas parvenus à décourager
les habitants qui sont encore un millier à vivre ici.
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Dans la rue, nous rencontrons Petronilla,
une grand-mère qui nous propose de nous faire à manger. A trois, nous dînons
chez elle : soupe, lama, quinoa et maté sont servis et les discussions
s’enchainent. Petronilla s’inquiète pour Lison. Nous sommes fatigués, il serait
temps d’aller dormir, mais elle insiste pour que nous l’accompagnions faire une
prière à l’église. Nous n’osons pas refuser. Nous couchons Anatole et nous
voilà débarqués au beau milieu d’une messe. Chants, blabla, prières… Cécile pouffe
discrètement quand, pendant un chant, Petronilla va expliquer au pasteur la
raison de notre présence. Elle lui souffle le prénom de Lison à l’oreille. Elle
peine à le prononcer et il est bien incapable de le répéter. Nous nous retenons
de rire. La prière est dite, elle clôt la messe. Les fidèles viennent nous
saluer, ils nous font l’accolade.
Avec tout ça, Lison devrait aller
mieux.
Lundi 4.
Lison va mieux. Il est fort ce bon
dieu.
Les vélos sont chargés, prêts à
repartir. Avant, nous avons rendez-vous chez Petronilla pour le petit
déjeuner : soupe de quinoa, œufs brouillés, beignets, pain, infusion, le
tout presque à volonté. Elle nous a même préparé un repas à emporter pour le
midi et nous donne deux gros sacs de quinoa. Nous la remercions puis retrouvons
le salar. Après une dizaine de kilomètres, au milieu de cette étendue blanche,
tous les repères sont bousculés, les distances sont presque impossibles à
estimer ! Mais, en l’absence de route, on peut rouler absolument partout,
c’est génial ! Les enfants s’amusent à faire des tours, à droite, à
gauche, en cercle, avec et sans les mains.
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Après quarante kilomètres, nous en
avons fini avec Coipasa. Nous roulons jusqu’au petit village de Luca où nous
nous ravitaillons en eau dans la cour de l’école. Nous plantons la tente
quelques hectomètres plus loin sur un terrain encore bien chargé en sel.
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Mardi 5.
Nous entamons deux étapes de
transition entre le salar de Coipasa et celui d’Uyuni. Comme souvent, le
terrain est exigeant physiquement et nous ne sommes pas mécontents de trouver
dès le début d’après-midi une chambre d’hôtel aux Salinas de Garci Mendoza.
C’est à mon tour d’être malade et
de ne rien pouvoir avaler...
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Mercredi 6.
Encore quelques efforts et nous y
serons. Nous traversons de petits villages qui vivent principalement de la
culture du quinoa. En route les enfants discutent de la rentrée, de leur classe
et des professeurs qu’ils auront. La connexion internet de la veille leur a
permis de découvrir ce qui les attendra au collège à leur retour, en mars
prochain.
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Nous rencontrons Giuseppe, un
italien à vélo. Nous roulons un temps ensemble, mais lui souhaitant dormir en
dur et nous bivouaquer, nous nous quittons peu après le passage d’un col, au dessus de Tahua. Nous
montons la tente une fois de plus dans des ruines, au pied du volcan Tunupa,
avec vue sur le mythique salar d’Uyuni, le plus grand du monde. Nous avons
prévu d’y passer deux nuits et d’y rouler 150 km.
De mon côté ce n’est toujours pas
la grande forme, pas beaucoup d’appétit, mais je tiens le coup.
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Jeudi 7.
Nous pénétrons le salar d’Uyuni par
une piste qui se démultiplie puis s’efface peu à peu. Au début, on se sent un
peu perdus et désorientés. Le GPS aussi. Des îles apparaissent au loin. Mais tant
que n’avons pas de point de repère connu, difficile de tenir un cap… Le GPS
revient à lui. Nous repérons l’île del Pescado qui, par le jeu de la diffraction,
semble voler au-dessus du lac de sel. Il ne reste plus qu’à tirer un azimut et
nous y serons, à un moment ou un autre. Le GPS est rangé, c’est l’île qui donne
le cap.
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Lison souhaitant faire une nuit à
la belle étoile pour admirer le ciel, nous nous arrêtons entre l’île de la
Tortuga et celle del Pescado, à côté d’un éperon rocheux. Nous installons le
camp de telle sorte que nous puissions voir le lever et le coucher du soleil.
Une fois la nuit tombée, la lune
n’étant pas levée, nous profitons d’un ciel d’une pureté incroyable.
J’en profite même un peu plus que
tout le monde, ne trouvant pas le sommeil à cause de douleurs au ventre. Je me retrouve
à vomir à quatre pattes sur le salar. Je passe une bonne partie de la nuit à
regarder les étoiles filantes…
Vendredi 8.
Salar d’Uyuni, jour 2. Il faut se
rendre à l’évidence, faire des vœux à regarder le ciel ça marche moins bien
qu’une messe. Au réveil, je suis toujours mal en point. Mais l’envie de pédaler
est intacte.
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Aux premiers tours de roues, à
faible allure, le craquement du sel donne l’impression de rouler sur de la
neige bien sèche. Quand notre rythme de croisière est atteint, le compteur
indique 20 km/h. Anatole branche son enceinte bluetooth : Eminem, lose
yourself. Les poils se dressent, les yeux s’humidifient puis s’embrument. Que
d’émotions, quel sentiment de liberté ! Nous roulons en musique et les
kilomètres défilent.
A midi, nous atteignons l’île
d’Incahuasi, la plus fréquentée, celle où les 4×4 emmènent les touristes.
Nous pique-niquons et achetons une
grande bouteille de coca pour me nettoyer l’estomac. Des Français voyageant en
camion nous donnent un pain de mie et une bière.
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Nous reprenons la route pour
retrouver le calme et du blanc à 360°. Peu avant de monter le camp au milieu du
salar, nous rencontrons Mohamet, un iranien qui parcourt le monde à vélo
depuis… seize ans !
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Samedi 9.
Salar d’Uyuni, jour 3. Encore une
quarantaine de kilomètres sur le Salar, puis 25 km de route asphaltée jusqu’à
Uyuni. Nous prenons notre temps. Peu après l’entrée du salar (pour nous ce sera
la sortie), on trouve un monument rendant hommage au passage du Dakar. Un peu
plus loin s’élève le plus vieil hôtel de sel du monde et la place des drapeaux, où
flottent des bannières du monde entier.
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Nous arrivons dans l’après-midi à
Uyuni, où nous sommes accueillis par Myriam et Lucas dans leur Casa Ciclista
« Pingui ». Nous nous installons et filons en ville dévorer des
hamburgers. L’appétit est revenu.
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Dimanche 10.
Nous avons besoin de faire le point
sur la suite du parcours qui n’est pas encore bien défini. Nous avons besoin
également d’un peu de confort. Pour nous poser quelques jours, nous partons à
la recherche d’un hôtel qui nous offrira des bons lits bien douillets, une
douche (vraiment) chaude, du wifi, du chauffage et de bons petits déjeuners.
Lundi 11.
Nous quittons la Casa Ciclista,
lieu d’hospitalité et de rencontre de cyclistes du monde entier, comme en
attestent les centaines d’inscriptions sur les murs.
Nous allons prendre possession de
nos chambres à l’hôtel Piedra Blanca. Il y a une cuisine à disposition, un
grand espace commun, le tout aux normes occidentales. Ça fait quand même du
bien !
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En pensant que vous vous reposez quelques jours, nous sommes heureux pour vous. Même doudou chat sur son réchaud semble bien fatigué !
RépondreSupprimerNous n'aurions jamais imaginé que de tels territoires salés puissent exister. Les salins du midi, c'est de la rigolade !
Martine Cerebos
Bonjour, nous sommes les amis d'Aurelie qui étions à votre place il y a quelques semaines. Beaucoup de nostalgie à la lecture de votre blog depuis Cusco, le séjour chez Giovanni, en Amazonie, Sajama et la sensation indescriptible de rouler sur les Salars! Quelle belle aventure à vivre en famille!
RépondreSupprimerOn vous souhaite encore de belles découvertes sur les routes des Andes. Et merci pour la photo de notre dédicace à la Casa Pinguin, ce petit clin d'oeil a égayé mon après-midi au travail! Bonne route à vous 4
Quelle aventure! Au moins, vous ne manquez pas de sel! et d'humour avec vos dernières photos que je trouve très sympas. J'espère que vous avez tous retrouvé la forme pour la suite et continuez à nous émerveiller !
RépondreSupprimerOh mais waouh l'Autre Monde ♥o♥
RépondreSupprimerA nouveau une semaine qui rêver ! ! Je me demandais si vous n'aviez pas tenté le roulage nocturne sous la voûté étoilée, le salar semblant être parfaitement plat?
Les photos en trompe-l'oeil sont particulièrement réussies, la marmite particulièrement. (Mais historiquement, la méditation en tailleur se fait en tenue d'Eve ♫)
Bravo aussi aux gastros diverses d'avoir réussi à vous rattraper, à la vitesse à laquelle vous allez ça a pas dû être évident pour elles, mais bon cette fois encore elles ne vous ont pas vaincus! Presque un mal pour un bien ce mal de ventre finalement? en général à la belle étoile on s'endort vite et on profite trop peu de sa majesté. Je mangerais des clous rouillés la prochaine fois pour voir.
Prenez soin de vous ♥
Coin-coin loin-coin
Géniales ces photos ! Cette étendue blanche... ce doit être magique . On vous embrasse fort !
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