mercredi 25 octobre 2023

Viento, compleaños y hospitalidad

Lundi 16 octobre.
A quatre de nouveau, nous retrouvons la route 40 là où nous l’avions laissée. Après 76 km peu enthousiasmants, à part un final sinueux, nous arrivons au camping municipal de Santa Maria. Les lits en dortoir sont à 700 pesos par personne, nous sommes seuls, aucune raison de vouloir planter la tente.
Mardi 17.
Nous discutons des deux options du jour :
- faire une étape de 50 km, jusqu’à l’entrée d’un désert d’une soixantaine de kilomètres et bivouaquer à côté d’une petite chapelle, dernière construction susceptible de pouvoir nous abriter du vent ;
- faire une étape de 115 km qui nous fait traverser le désert et poursuivre jusqu’à la ville suivante.
Cela dépendra du vent qui souffle plutôt de face ces jours-ci.
Les 50 premiers kilomètres s’avalent facilement, le vent est à peine levé et il est plutôt favorable.
Nous pique-niquons à la petite chapelle. Nous avons l’après-midi devant nous, tout le monde est partant pour poursuivre. Un argentin s’arrête nous ravitailler en eau mais notre poche de réserve est pleine. Nous avons prévu ce qu’il faut, au cas où nous devrions passer la nuit au milieu du désert.
Anatole branche son enceinte, nous pédalons en sifflotant. « C’est facile de faire 120 km ! »
Oups… Ne jamais parler trop vite… Le vent hésite, s’affole, se renforce et nous scotche littéralement sur place. Nous l’aurons de face jusqu’à la fin. Nos sacoches lui offrent une résistance plus que certaine. C’est une lutte à chaque coup de pédale. La route est pourtant parfaitement plate mais le compteur descend sous les 8 km/h à chaque coup de semonce... Les cinquante derniers kilomètres se font au mental.
Comme un cheval qui sent l’écurie, à l’approche de Hualfin, les enfants filent devant. Nous loupons la sortie pour le village et il faudra rouler encore un peu plus ! Au kilomètre 119, nous arrivons à l’auberge municipale, exténués. L’option 2 est validée.
 
Mercredi 18.
Nous nous accordons une journée de repos à Hualfin. Nous quittons l’auberge municipale pour aller chez Adrian qui a un petit camping et quelques cabanes pour passer la journée et la prochaine nuit.
Nous faisons une dégustation à la cave municipale du village, fondée en 2012 suite à un procès gagné contre des exploitants miniers pollueurs.
Nous randonnons dans le canyon de Pozo verde. Pendant que les parents font la sieste, les enfants finissent l’après-midi à jouer avec Federico, le fils d’Adrian. Les animaux se comptent par dizaines : lamas, chevaux, chèvres, moutons, poules, canards, oies, perroquets, des lapins et huit chiens ! Federico les emmène arpenter les vignes, la montagne et les grottes alentour.
Nous passons la soirée autour du feu avec Omar, venu de Buenos Aires pour se ressourcer loin de l’agitation de la ville. Sincère, généreux et très touchant, nous discutons jusqu’à bien plus tard que prévu.
Jeudi 19.
Nous avons réservé une maison à Belen pour trois nuits afin de fêter les 13 ans de Lison.
Nous sommes à une soixantaine de kilomètres de notre ville étape. Rien d’exceptionnel en chemin. Nous sommes cependant intrigués par ces petits autels rouges ornés de drapeaux et de bandeaux de la même couleur qui apparaissent chaque jour au bord des routes et dont nous ne connaissons pas le sens. Il s’agit en fait de sanctuaires en dévotion à Gauchito Gil, un saint païen des dépossédés, décapité au XIXème siècle. Les voyageurs s’y arrêtent pour prier, lui rendre grâce pour ses supposés miracles et déposer des objets rouges mais aussi des cigarettes et des bouteilles de vin !
Le vent est toujours en notre défaveur mais dès 14 heures, nous sommes accueillis par Liliana. Un accueil magistral ! Le frigo est plein et Liliana nous a fait de délicieuses empanadas toutes chaudes. Que bueno !
Comme les dernières étapes, celles qui s’annoncent paraissent peu intéressantes ou tout au moins paraissent avoir un air de déjà -trop- vu. Il nous trotte dans la tête d’aller désormais rapidement plus au sud pour découvrir d’autres paysages sous d’autres latitudes.
Nous nous renseignons sur les bus : compliqué avec les vélos. A la station, suivant les interlocuteurs, on nous dit « peut-être », on nous dit « possible », on nous dit « pas possible ». On n’est pas très avancés. Nos lectures sur les forums confirment que c’est toujours incertain de pouvoir embarquer des vélos en Argentine. 
A une heure du matin, nous nous rendons à la gare routière pour voir si le bus pour Catamarca accepte les vélos. Il faut visiblement négocier avec le chauffeur et éventuellement lui graisser la patte… Celui-là, malgré un air patibulaire, ne semble pas voir de problème… Mais à bien y regarder, on se demande comment quatre vélos plus les bagages vont pouvoir rentrer en soute et laisser suffisamment de place aux autres passagers. Sans compter que si on accepte nos vélos jusqu’à Catamarca, on pourra nous les refuser pour aller ensuite jusqu’à Mendoza. Bref, option bus abandonnée.
 
Vendredi 20.
Jour anniversaire. Liliana, toujours aux petits soins, a fait préparer par une amie un délicieux gâteau au dulce de leche et à la fraise. Il n’y a plus qu’à trouver une bougie. Feliz compleaños Lison !
Nous parcourons la ville à la recherche d’un plan B. Grossistes, commerçants ou autres professionnels peuvent peut-être se rendre à Mendoza à vide… Nous avons une touche mais elle tombera finalement à l’eau. Il va sans doute falloir continuer à vélo jusqu’à Mendoza.
En attendant, nous découvrons Bélen. Nous continuons à réfléchir.
Nous proposons à Liliana et son mari Ruben de venir prendre un apéritif à la maison. Il se trouve qu’ils doivent aller à Mendoza pour voir leur fils jeudi. Ils nous proposent de nous emmener.
 
Du samedi 21 au mardi 24.
A la mi-temps de notre voyage nous recevons nos premières gouttes de pluie.
Notre séjour à Belen se poursuit, en attendant jeudi et notre départ pour Mendoza. 
La maison étant louée dès le dimanche, nous nous préparons à aller au camping. C’est sans compter sur l’attention de Liliana et Ruben qui nous proposent de nous loger dans un studio, juste à côté. Ils nous invitent à faire un asado chez Fidol et Maria, oncle et tante. Fidol est un asador hors pair et nous sommes reçus comme si nous étions de la famille. Quelle chance nous avons d’avoir rencontré des personnes d’une telle gentillesse. Liliana, Ruben, Maria y Fidol, muchisima gracias ! 
Mercredi 25.
Nous préparons les bagages et les vélos qui doivent tenir dans la benne du pick-up de Ruben et Liliana. Il manque une place dans la voiture pour que tout le monde tienne. Cécile prendra le bus. Je reste avec les enfants pour la manutention des vélos.
Demain nous nous retrouverons à Mendoza. Nous aurons fait un bond de 800 km plus au sud.

dimanche 15 octobre 2023

Una semana con Giuseppe

Du mardi 3 au vendredi 6 octobre.
Nous profitons du confort de notre maison pour faire travailler les enfants, cuisiner et nous reposer. Nous recevons Luis, Guiseppe, Augus et la famille Permanne : un Bolivien, un Italien, une Argentine et dix Français. On ne peut pas dire qu’on ait beaucoup visité Salta, ces quelques jours ayant plutôt eu un petit air de « comme à la maison ».
Samedi 7.
Remise en selle. Difficile de se lever tôt…
En milieu de matinée nous retrouvons Giuseppe en centre-ville. Nous avons décidé de faire un bout de chemin ensemble, au moins jusqu’à Cafayate.
C’est ensuite Luis que nous retrouvons à Cerrillos où il aide à l’organisation d’une compétition de VTT. Lison et Anatole testent le circuit. Impressionné par leur aisance, il souhaite les inscrire à la course de l’après-midi. Après quelques hésitations et un copieux pique-nique, nous reprenons finalement notre chemin. Adios Luis !
Nous tentons de quitter les zones urbanisées en évitant la circulation. La route 49 et son revêtement chaotique font parfaitement l’affaire. Quasiment aucun trafic, mais ça secoue fort par moment. Cécile perd en route ses sandales sans doute insuffisamment harnachées.
En milieu d’après-midi nous atteignons notre objectif, la route 33. Il nous faut cependant rouler encore une dizaine de kilomètres pour trouver un coin de bivouac. Nous nous installons au bord du rio Escopie, à quelques mètres du pont Chorro blanco. Les enfants nous préparent un feu. Nous trinquons à notre première journée de vélo à cinq.
Dimanche 8.
Les choses sérieuses commencent : un col à presque 3 500 m d’altitude et quasiment 50 kilomètres de montée. La route est asphaltée. Par le jeu des bosses dues au franchissement des vallées adjacentes, nous prenons lentement de l’altitude. En levant la tête on aperçoit les condors flirter avec les falaises. Les cactus apparaissent, ils cohabitent quelque temps avec les arbres.
Après une première partie sinueuse et agréable, une grande, monotone et décourageante ligne droite réussit à entamer nos forces. Nous arrivons au lieu-dit « pie de la cuesta », indiquant sans doute que le plus dur est à venir.
Ouvrant la voie vers le sommet, la route devient piste : sable, terre, pierres, tôle ondulée et forts pourcentages rendent l’effort intense. Sans compter la poussière soulevée à chaque passage de véhicule et le vent qui se lève. Le versant sur lequel nous progressons est raide. Trouver un endroit où planter une tente semble compliqué.
Dans un virage, un inespéré bout de terrain plat nous tend les bras. Après avoir franchi une clôture et déblayé bouses et crottins, l’espace est prêt à accueillir nos tentes.
33 km et 1 870 mètres de dénivelé positif, il n’en fallait pas beaucoup plus pour aujourd’hui. D’où nous sommes, nous apercevons le sommet, à 1 300 m au-dessus de nos têtes…
Lundi 9.
La tente est gelée, mais la nuit fut bonne et nous avons repris des forces.
Il reste 14 km d’ascension. Les vues sont spectaculaires. Lors d’une pause à un mirador, nous faisons connaissance avec un petit renard gris d’Argentine venu renifler nos sacoches.
Nous venons à bout de la « cuesta del Obispo » plus facilement et plus rapidement que prévu. Bien avant midi, nous sommes au sommet. Avec Giuseppe, nous nous congratulons, heureux et émus d’en terminer. Les touristes, argentins, brésiliens, uruguayens ou bien français nous félicitent et demandent à nous prendre en photo. Ils sont bavards, il est difficile de repartir !
Nous retrouvons l’asphalte. Ce sont maintenant cinquante kilomètres de dénivelé négatif qui nous attendent. Nous poussons quelques cris de joie avant d'entamer une folle descente à travers une vaste pampa.
Nous pique-niquons à l’entrée du parc national Los Cardones. Un désert de cactus a envahi le paysage.
Un Français vient féliciter les enfants, il est ému aux larmes de les savoir parcourir l’Argentine à vélo.
Nous reprenons la route 33. La recta del Tin Tin, incroyable ligne droite de 15 km dont la construction fut entreprise dès le XVème siècle par les Incas, traverse la zone protégée. Les dizaines de milliers de cactus séculaires, aux bras étranges, tous différents et poussant d’un à trois centimètres par an nous regardent passer.
Nous quittons la ruta 33 et rejoignons la 40, la route mythique de 5 224 km traversant l’Argentine du nord au sud. Nous ne la ferons pas entièrement mais elle va désormais nous occuper un moment.
Nous arrivons à Cachi en milieu d’après-midi. Après une glace bien méritée, nous nous installons au camping municipal.
Garé près du centre du village, nous découvrons le camion de David, Prune, Vanille, Théophile, Apolline et Anatole. Les adultes terminent la journée par un apéro pendant que les enfants partagent quelques bons moments dans le camion.

Mardi 10.
Journée de repos peu reposante. Après un tour d’une vingtaine de kilomètres autour de Cachi nous nous retrouvons avec Guiseppe, Jordan -un Américain- et la famille Permanne autour d’un barbecue. Les enfants sont contents de retrouver une fois de plus leurs copains.
Mercredi 11, jeudi 12, vendredi 13.
Trois journées sont nécessaires pour faire Cachi - Cafayate. Comme sur la moitié de sa longueur totale, la ruta 40 n’est pas asphaltée. La piste est éprouvante, toute en bosses, avec beaucoup de sable. Les secousses viendront à bout d'une conserve de cabillaud et de mon téléphone...
Nous traversons de petits villages pittoresques où le temps semble s’être arrêté. Les maisons sont en terre, parfois jusqu’à la toiture et les galeries aux imposantes colonnes protègent d’un soleil piquant. Beaucoup semblent abandonnées.
A chaque kilomètre, le paysage est spectaculaire. La route tantôt large, tantôt étroite serpente entre les parois parfois abruptes. Les formations rocheuses aux formes infinies alternent couleurs ternes et vives. Proche du rio, le vert des vignes, celui des prairies et des cultures tranchent avec ce décor minéral.
Pour quelques milliers de pesos nous trouvons des chambres dans les campings municipaux ou dans de petits hôtels de village. A Molinos, nous dormons à quatre pour l’équivalent de 7 €. Pas besoin de monter et démonter la tente, nous pouvons partir plus tôt le matin et nous arrêter plus tôt le soir, avant que le vent ne se renforce.
Nous découvrons également les vins locaux. Nous faisons quelques dégustations. Celle de la bodega Que Tal est mémorable. Le vigneron-poète Jorge, qui exploite un petit hectare de vigne, nous fait découvrir ses breuvages (un verre pour trois !) en déclamant ses poèmes. Un personnage...
Peu avant San Carlos, nous retrouvons l’asphalte, au plus grand bonheur d'Anatole !
Nous pédalons à travers le vignoble et les bodegas de cette grande région viticole. Les Argentins sont venus en nombre à Cafayate. Comme vendredi et lundi sont chômés, tout est complet ou presque. Nous trouvons non sans peine au sud de la ville un petit dortoir pour une halte bien appréciée. Nous partageons avec Guiseppe quelques empanadas et trinquons à cette belle semaine passée ensemble.
Samedi 14, dimanche 15.
Nous restons deux jours à Cafayate. Comme d’habitude, travail, repos et balades sont au programme.
Nous faisons un dernier restaurant avec Giuseppe qui va reprendre la route avant nous.
Pour nous quatre, ce fut un vrai plaisir de partager avec lui ces belles étapes, les difficultés et les joies, et tous ces moments de rire et convivialité. Ce fut toujours simple et facile.
Nous avons gagné un ami. Grazie mille Giuseppe ! Ciao !